Vues des vérandas africaines: les ONG internationales à la reconquête d’une Afrique postcoloniale

Par Barbara Delhez

RÉSUMÉ:
Les pratiques des professionnels de l’humanitaire présents sur le sol africain demeurent encore trop souvent modelées par un héritage de l’époque coloniale, que cela soit dans la relation de donateur qui transpose ses priorités et son agenda propre aux pays africains ; ou bien dans la mise en œuvre des projets chapeautés par des expatriés, humanitaires de carrière. Il appartient aux gouvernements locaux et à la société civile de mettre en place des dispositifs et des législations qui permettent d’enrayer les pratiques discriminatoires ou d’ingérences, notamment en termes de gestion des ressources humaines. La circulaire adoptée par le gouvernement du Président Kenyatta pour réglementer le travail du personnel international offre les bases d’une réflexion intéressante.

PROBLÉMATIQUE:
Certaines ONG occidentales ne perpétuent-elles pas dans leurs pratiques des rapports de domination et ne participent-elles pas de cette hégémonie occidentale au nom de valeurs humanistes définies comme universelles ? Le monde humanitaire n’est-il pas en quelque sorte un adjuvant de la politique des Etats occidentaux et donc de la domination occidentale ? Les ONG s’inscrivent-elles comme le prolongement ou le nouvel instrument de néocolonialisme ? Dans quelle mesure la construction d’un « homo humanitarus » qualifié d’ « expatrié » participe-t-elle ou non à la perpétuation des rapports de pouvoir entre personnel local et occidental ? Comment se départir de cet héritage colonial qui continue à modeler les actions et représentations, nuit au développement et perpétue des rapports qui en référence au « soft power » pourraient être qualifiés de « soft coloniaux » ?

CONTEXTE DE LA NOTE:
Les ONG déployées sur le continent ont vocation à inscrire leur présence sur la durée. Les humanitaires, qui autrefois intervenaient dans le but de répondre à des situations de crises et d’urgences, ont revu leur mode de fonctionnement. Faire carrière dans le secteur devient un parcours professionnel convoité, d’autant que le nombre d’ONG ne cesse d’augmenter. Au cours des dernières décennies, Nairobi ou encore Dakar sont devenues de vraies hub d’ONG internationales, avec leur quartier résidentiel d’expatriés. Ces expatriés apparaissent parfois aux yeux des locaux comme les agents d’une globalisation qui agissent pour le compte d’intérêts propres.

IDÉES MAJEURES:
Les pratiques de certaines ONG (de développement) présentes sur le sol africain demeurent encore trop souvent modelées par un héritage de l’époque coloniale;

Elles peuvent représenter des instruments de softcolonialisme et la perception des populations locales de leur travail est parfois très mitigée ;

Certaines de leur pratiques notamment en termes de politique des ressources humaines sont discriminatoires envers les personnels locaux ;

Les Etats Africains doivent mettre en place une législation stricte à l’image du Kenya pour réguler les inégalités engendrées par les ONG.

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