Note d’analyse politique № 100 INSTABILITÉ ET COUP D’ÉTAT AU SAHEL – OIF – Observatoire Sahel TA

Il apparait nécessaire de commencer par apporter un éclairage dans la conception faite du Sahel. Cette région du continent africain couvre un espace assez large qui, selon certains auteurs, va de l’océan Atlantique à la mer Rouge (d’Est en Ouest) et est comprise entre le Sahara et la savane de type soudanien (du Nord au Sud)[1]. De façon circonscrite, dans cette note, le Sahel se limite à la zone du Mali, du Niger, de la Mauritanie, du Burkina-Faso et dans une moindre mesure le Tchad et le Soudan. Elle intègre en son sein la zone du Liptako Gourma, aussi appelée zone de trois frontières (Burkina-Faso, Mali et Niger). Cela se justifie par le fait que cette zone correspond au foyer de tensions tant sécuritaires que de déstabilisation institutionnelle marquée par des coups d’Etat. D’ailleurs, la superposition d’organisations internationales[2] dans la sous-région témoigne de l’acuité des difficultés économiques et sécuritaires (dont la résorption fait partie des objectifs recherchés par ces organisations) dans cette partie de l’Afrique.

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Le Sahel, déjà affaibli par un contexte socioéconomique caractérisé par la pauvreté, le chômage, les changements climatiques, la faiblesse des institutions, voit sa situation s’aggraver depuis la crise libyenne  où un climat sécuritaire délétère et inquiétant a conduit à des renversements de régimes politiques notamment au Mali et au Burkina Faso. Toutes choses vraisemblablement consécutives à la déliquescence des conditions de vie des populations par la présence dans la région de groupes armés violents et extrémistes. En effet, commencées au Mali,  Ces crises sécuritaires trouvent leurs sources dans les rebellions touarègues qu’ont connues le Mali et le Niger. En effet, bien avant les indépendances les communautés servaient les desseins du colonisateur qui formait avec ou contre certaines d’entre elles de grands ensembles pour des besoins d’administration.  Ce faisant[4], certaines communautés se sont retrouvées en marge du processus de construction des « États-nations » nouvellement indépendants. Ainsi, l’intégration de ces communautés dans l’effort de construction nationale n’a pas toujours été une réussite d’autant plus qu’elles-mêmes voulaient échapper à l’équilibre précolonial d’antan[5]. Ces faits se font sentir très tôt au Mali avec la première rébellion de 1963, qui selon certains chercheurs, n’est que la chiquenaude qui continuera, malgré certaines périodes

d’accalmie, jusqu’en 2012, année décisive de la belligérance identitaire touarègue. Cette même question se fait sentir au Niger lors de la tentative de coup d’Etat militaire contre le Président Seyni Kountché où le premier incident avec la rébellion touarègue intervient. Mais la gestion de la question touarègue au Niger fut plus efficace qu’au Mali. En effet, au Niger la construction de l’Etat a accordé un rôle prépondérant aux leaders touaregs, en tant qu’autorités traditionnelles avec un réel pouvoir politique[1].

C’est ce contexte historique qui marque la rébellion et ses effets dans cette zone du Sahel. Cette situation enregistre la présence et l’apparition de nouveaux acteurs : les chefs traditionnels, coutumiers et religieux, les groupes armés violents, terroristes et extrémistes, les groupes armés identitaires et sécessionnistes.

Avant que la démocratie n’apporte un semblant de stabilité politique, la situation institutionnelle dans l’espace sahélien restait marquée par une trentaine de coups d’Etat réussis ou avortés, entre 1963 et 1997 (au Mali, en Mauritanie, au Niger, au Burkina Faso, au Tchad et au Soudan).

Les élections, devenues le seul mode légitime d’accession au pouvoir, demeurent un nœud gordien des problèmes au Sahel. Lequel Sahel est marqué par des instabilités notoires avec des conséquences quelques fois sanglantes. Ce nouveau paradigme dans la région sahélienne nécessite la prise en compte de la dynamique du nexus instabilité politique et coup d’État militaire. Cependant, on ne peut passer sous silence la corruption, l’impunité ainsi que l’injustice (dysfonctionnement même de la justice et sa faible adéquation avec les modes de fonctionnement des sociétés du Sahel) qui sous-tendent l’instabilité politique et même sécuritaire.  Donc la difficulté qu’éprouvent les États du Sahel à se construire autour de leurs réalités socioculturelles et historiques demeure une problématique majeure de la gouvernance.

 

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